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Prévention : Comprendre, prévenir, agir

Sur le papier, l’objectif de la prévention est simple : faire baisser un risque donné. Chez les assureurs, cela se traduit par une déclinaison toujours plus pointue d’expertises et de formats d’action.

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Le grand incendie de Londres de 1666 eut au moins un mérite, celui de donner naissance aux premières assurances britanniques, prémices des assurances habitation. Diminuer les risques d’un futur désastre passait alors par un travail conjoint des pompiers londoniens et des assureurs, afin de produire et diffuser des normes de sécurité dans les habitations. Assurances et prévention devenaient indissociables.

Comprendre pour changer

« Face à un risque, il y a deux voies. Vous pouvez le couvrir, ce qui coûte potentiellement cher et participe à faire monter les primes. Ou vous pouvez tenter d’agir sur lui pour l’atténuer », schématise Stéphane Loisel, titulaire de la chaire actuariat et science du risque au Cnam (Conservatoire national des arts et métiers).

Agir sur le risque suppose de le comprendre. En la matière, les outils d’évaluation des assurances ont connu une révolution. À la masse de données internes dont elles disposent – leur clientèle peut compter plusieurs millions de personnes – s’ajoutent quantité d’informations externes, provenant de la science et du traitement de la data. « Pour l’habitation, nous disposons aujourd’hui d’informations très granulaires par terrain. Par exemple, les photos satellite montrant la disposition des arbres apportent une idée plus précise de la composition des sols », illustre Stéphane Loisel. Des analyses qui intéressent tant les assurances que l’État, dans ses stratégies de développement urbain ou la prévention des catastrophes naturelles. En ce qui concerne la santé, IA et consorts donnent une image toujours plus précise des risques de pathologies à moyen et long termes (selon le mode de vie, l’âge, la profession, etc.). Ces avancées sont évidemment majeures, mais attention : « Suivre la logique d’un algorithme reviendrait à exclure certains profils considérés trop à risque de toute couverture, met en garde Stéphane Loisel. Veillons à avoir des garde-fous éthiques et juridiques ! »

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Nouvelles voies d’action

Les actions de prévention peuvent prendre la forme de campagnes de sensibilisation sur des sujets précis, la mieux connue du grand public, mais aussi d’incitations financières, via des baisses de primes quand un client s’engage dans certaines démarches (participer à un programme de sevrage tabagique, par exemple) ou des remises pour pratiquer un sport. Il peut aussi s’agir de formations, en partenariat avec des acteurs locaux en proie à des risques spécifiques (zones inondables, incendie, séisme), ou de délivrer du conseil, en proposant des diagnostics de sécurité des logements puis des recommandations, etc.

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La technologie apporte son lot de nouveaux outils comme en santé, avec les bracelets connectés, dans la sécurité routière, avec les dispositifs télématiques (boîtiers à installer dans sa voiture) destinés aux jeunes conducteurs, pour tout à la fois évaluer leur comportement au volant, analyser leur conduite, leur dispenser des conseils personnalisés… et puisque le risque zéro n’existe pas, pour qu’ils puissent contacter une dépanneuse en cas de dommage…

Les terrains sur lesquels s’engagent les assurances sont communs à ceux des pouvoirs publics. « Les assureurs font des efforts, mais je suis convaincu qu’ils pourraient apporter davantage en construisant une meilleure complémentarité avec l’État », suggère le chercheur du Cnam. On en trouve une nouvelle illustration avec la santé. « Inciter les gens à mieux manger ou être dépistés de certaines maladies évite surtout les gros pépins. Or, cela “profite” beaucoup à la Sécurité sociale, mais peu aux assurances », appuie-t-il, plaidant pour « un système de partage des dépenses ou de récompense, qui inciterait le secteur à aller encore plus loin. » De manière générale, les défis à venir – climatiques, cyber-menaces, grand âge – appelleront tous les acteurs à mettre leur expertise en commun. Comme les pompiers et assureurs de Londres en leur temps.

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