Présente au Raise Summit 2025, évènement international dédié à la technologie, la députée Isabelle Rauch (Horizons & Indépendants) alerte sur l’invisibilité persistante des femmes dans les secteurs du numérique et de l’IA. Et appelle à des mesures concrètes pour changer la donne.

Isabelle Rauch, députée du groupe Horizons & Indépendants de Moselle. Photo :
« Une femme sur trois intervenants : nous étions déjà pratiquement au-dessus des standards du secteur en matière de parité », glisse Isabelle Rauch, députée du groupe Horizons & Indépendants de Moselle, mi-ironique, mi-fataliste, lors du Raise Summit, évènement international dédié à la technologie, qui s’est déroulé les 8 et 9 juillet, au Louvre (Paris). Secrétaire nationale à l’égalité femmes-hommes de son parti, elle est intervenue lors de l’événement au sujet de la place des femmes dans les métiers du numérique. Dans ce domaine, les inégalités de genre persistent. En France, les femmes ne représentent que 12 % des chercheuses en Intelligence Artificielle (IA) et à peine 22 % des professionnels du domaine, contre 26 % au sein de l’Union européenne. Un chiffre qui en dit long, et qui interroge : pourquoi une telle sous-représentation ? Deux causes principales émergent. Et l’élue, engagée sur ces enjeux depuis plus de cinq ans, les connaît bien. Pour elle, le numérique est devenu un miroir grossissant des inégalités : « Le manque de diversité nourrit les biais, et les biais nourrissent les inégalités », explique-t-elle.
Algorithmes et culture masculine
La députée ne blâme pas les machines, mais le fonctionnement des systèmes sur lesquels elles s’appuient. Les algorithmes, rappelle-t-elle, « se nourrissent de bases de données genrées, anciennes, dans lesquelles les métiers scientifiques sont très majoritairement occupés par des hommes ». Résultat, ces derniers reproduisent, voire amplifient ces biais : « l’algorithme va apprendre tout seul pour un emploi de data scientist, il vaut mieux un homme qu’une femme », résume la secrétaire nationale.
Et dans un secteur où les ingénieurs sont majoritairement des hommes, ces biais sexistes sont rarement corrigés : « on code avec sa culture, souligne-t-elle, l’IA augmente les inégalités de genre, y compris en dehors de la tech, puisqu’elle est utilisée partout ».
L’école, première fracture
Mais pour Isabelle Rauch, il ne faut pas sous-estimer le poids de l’éducation dans la sous représentativité des femmes dans le secteur du numérique. Et ce, dès le plus jeune âge. Une étude parue en juin 2025, co-signée par Stanislas Dehaene, professeur au Collège de France, et Pauline Martinot, médecin et neuroscientifique, a montré que les écarts de niveau en mathématiques entre filles et garçons apparaissent quelques mois seulement après le début du CP, alors qu’ils sont inexistants auparavant.
La députée y voit la conséquence de biais cognitifs inconscients : « Les professeurs des écoles, souvent issus de formations littéraires, interrogent plus spontanément les garçons sur des sujets scientifiques », appuie-t-elle. Peu à peu, les filles s’autocensurent, et s’orientent vers des filières plus littéraires. Avec le temps, la fracture se creuse. « Il faut s’interroger sur ces mécanismes très précoces si on veut vraiment lutter contre les inégalités dans les métiers de demain », insiste l’élue. Face à ce constat, Isabelle Rauch appelle à des réponses multiples. D’abord, « montrer des femmes dans la tech, des rôles modèles, pour que les jeunes filles puissent s’identifier et se projeter ». Ensuite, agir sur la formation : celle des enseignants.
Un enjeu de justice… et de croissance
Et pour celles et ceux qui ne seraient pas convaincus par l’argument moral, Isabelle Rauch avance l’argument économique : « La parité en entreprise améliore les résultats. On estime que l’égalité femmes-hommes pourrait rapporter dix points de PIB à la France ».
Alors que le projet de loi de finances pour 2026 est en pleine élaboration et que toutes les options sont sur la table pour réduire les dépenses publiques, elle tranche : « Si la raison philosophique ne suffit pas, la raison économique devrait l’emporter. » Reste désormais à passer des intentions à l’action.