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Les Français inquiets pour leur santé

Selon un sondage Kantar pour L’Hémicycle, la France n’est plus un des leaders mondiaux dans ce domaine qui faisait naguère leur fierté. Avec le replay de l’émission Défis 2022 du 8 février. 

Group of doctors in a hurry down the hospital hallway

En matière de santé comme dans d’autres domaines, la France a perdu son rang. C’est, en tout cas, la perception des Français qui ont répondu au 6e sondage de l’institut Kantar pour L’Hémicycle et Epoka. Les Français se montrent inquiets, et même déçus, d’autant plus que, pour eux, ce n’est pas un sujet comme les autres (59%). Ils sont attachés à leur système de santé qu’ils estiment d’abord devoir être gratuit pour tous (69%). L’accès aux soins et la lutte contre les déserts médicaux (62%) sont des priorités, devant le recrutement de personnel soignant (47%), lequel doit être mieux rémunéré (36%). 

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Un système en danger

Les Français sont particulièrement préoccupés par la situation de l’hôpital public. Une écrasante majorité d’entre eux (87%) déplorent qu’elle se soit dégradée et constatent que la France a perdu sa place de leader dans ce domaine qui était, il y a peu, un motif de fierté. Pour Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France, qui était l’invité de l’émission Défis 2022 de L’Hémicycle, le 8 février, la crise a aggravé une institution qui était déjà fragilisée. « Il y a une perte de sens à l’hôpital, a-t-il souligné. L’augmentation des salaires ne fait pas tout. On a l’impression que c’est tout hôpital qui prend l’eau, mais quand on regarde en dehors de ses quatre murs, c’est tout le système de santé qui prend l’eau. La médecine libérale vit aussi une crise profonde. Et pourtant, pour les Français, les généralistes sont la porte d’entrée dans le système de soins. Mais ces derniers sont de moins en moins nombreux. » Un constat partagé par Margaux de Frouville, cheffe du service santé de BFMTV. « La situation de l’hôpital est pire qu’il y a deux ans, a-t-elle ajouté, en citant un sondage du Collectif Inter-Hôpitaux. Interrogés deux ans après leur démission de leurs fonctions administratives, près de 500 chefs de service ont répondu que les conditions de travail s’étaient dégradées pour 65% d’entre eux ; 35% estimant que ce n’était ni pire, ni mieux. La quasi-totalité (95%) des répondants estiment que le Ségur de la Santé [en 2020] n’est pas parvenu à rendre l’hôpital plus attractif. »

L’industrie française ne va pas fort non plus, aux yeux des sondés. Une majorité relative de répondants considèrent que la France a pris du retard en ce qui concerne la qualité à la fois de l’innovation et de la production de son industrie pharmaceutique. Six Français sur dix s’inquiètent ainsi qu’aucun laboratoire français n’ait réussi à produire un vaccin contre le Covid-19. La révélation, au début de l’épidémie, de la perte de souveraineté dans la production de médicaments avait déjà été un coup dur. « La crise a fonctionné comme un révélateur et un accélérateur de forces que nous ignorions, et de fragilités que, parfois, nous connaissions », a expliqué, au cours de Défis 2022, Frédéric Collet, président de Novartis et du Leem (Les entreprises du médicament), le syndicat des laboratoires. Et de poursuivre : « Dans ces circonstances, l’ensemble de la chaîne du médicament a tenu pour assurer la disponibilité des traitements et l’invention et le développement de solutions innovantes. La collaboration d’acteurs qui n’étaient pas habitués à travailler ensemble a ainsi permis de développer en huit mois des vaccins contre le Covid-19, au lieu de dix ans. La prochaine étape importante sera celle de traitements qui devront préserver le système de santé et les soignants ».

Les Français mitigés quant à la façon dont le gouvernement a géré la crise

Comment les Français perçoivent-ils la gestion de la crise par le gouvernement ? Pas si mal, selon l’étude Kantar. Si l’Allemagne est le pays qui semble, à leurs yeux, le mieux avoir géré la crise, la France arrive deuxième sur le podium, devant la Suède. Une performance d’autant plus remarquable que la crise est d’une ampleur inédite et qu’on savait peu de choses, à ses débuts, sur ce nouveau coronavirus, a rappelé l’économiste et essayiste Nicolas Bouzou (2), sur le plateau de Défis 2022 : « C’est trop tôt pour faire un bilan. Une épidémie, ce n’est pas une catastrophe naturelle où l’on compte le nombre de morts, mais un process systémique. Deux phénomènes seulement peuvent mettre par terre une société : les guerres et les épidémies. Si on nous avait dit, il y a un an, qu’on serait le seul pays de la zone euro à avoir un PIB supérieur au niveau d’avant la crise, on ne l’aurait pas cru. La crise sanitaire, c’est la plus grave depuis cent ans, la crise économique, la plus grave depuis quatre-vingt ans. Je dis que, collectivement, on n’a pas été si mauvais que cela ». Les sondés restent toutefois partagés quant aux objectifs de la gestion de la crise, entre protection sanitaire (14%) et impératifs économiques (38%). A propos du pass vaccinal, presque 6 Français sur 10 y sont favorables, mais 30% y restent opposés, et, parmi ceux-ci, près d’un jeune sur deux (18-24 ans). A l’inverse, les plus de 65 ans sont pour à 68%. Signe d’une fracture générationnelle… 

Margaux de Frouville, Frédéric Valletoux (g.) et Frédéric Collet (d.) sur le plateau de l’émission Défis 2022 animée par Arnaud Ardoin.

Quel impact sur le vote à la présidentielle ?

Les Français estiment que la crise occupent globalement trop de place dans la campagne et que des informations trompeuses circulent à ce sujet – 82% le pensent, soit plus que sur la sécurité ! De même, une écrasante majorité d’entre eux considèrent que cela aura un impact sur le vote d’avril prochain, mais quand on leur pose la question de savoir si cela influencera leur propre vote, un sur deux seulement l’admet. Prudence, donc ? « Je suis frappée par l’importance de ces scores, a commenté, pour sa part, Laure Salvaing, directrice générale de Kantar Public. La santé est revenue au-devant de la scène et la gestion de la crise sera un facteur déterminant de l’élection présidentielle. »Sur ce sujet comme sur les précédents (sécurité, Europe, environnement…) testés par Kantar pour L’Hémicycle, Emmanuel Macron apparaît comme le plus crédible (39%) par rapport à ses concurrents (31% pour Pécresse, 23% pour Le Pen).

(1) Échantillon national de 1000 personnes représentatif de l’ensemble de la population âgée de 18 ans et plus, interrogées en ligne du 26 janvier au 1er février 2022. Méthode des quotas.

(2) Auteur de Homo Sanitas, histoire et avenir de la santé, Éditions XO, 2021.

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