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Coupe du monde 2022

Au-delà de la Coupe du monde, l’avenir du Qatar

Premier pays arabe à accueillir un tel événement, le riche émirat a dépensé sans compter, en espérant que ces investissements l’aideront à accomplir sa transition économique dans la perspective de l’après-pétrole.

The beautiful newly developing city with many skyscrapers , shot during sunrise

Les chiffres donnent le vertige. Le « petit » émirat de la péninsule arabique voit grand, très grand. A l’occasion de la 22e Coupe du monde de football, le Qatar aura investi globalement 187 milliards d’euros (200 milliards de dollars) pour développer toutes les infrastructures dont le pays a besoin pour assurer son avenir économique après les énergies fossiles. Le tout s’inscrit dans un plan de développement du pays qui couvre une période d’investissement jusqu’en 2030. Le décompte de l’après-pétrole et du gaz, dont il est le 3e producteur mondial, est enclenché dans ce pays.

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« Nous dépensons près de 500 millions de dollars par semaine sur les principaux projets, et cela va continuer pendant les trois à quatre prochaines années, afin d’atteindre notre objectif, celui d’être vraiment prêts pour 2022 », avait déclaré, en 2017, le ministre qatari des Finances Ali Shareef Al-Emadi. Le ministre expliquait alors que « 90% des contrats pour 2022 [avaient] d’ores et déjà été adjugés ». Ces colossaux investissements, alors que l’heure des énergies fossiles semble avoir sonné, sont mis sur la table pour assurer un développement dans les industries innovantes et le tourisme, comme relais de croissance d’un pays aujourd’hui parmi les plus riches du monde grâce à la rente pétrolière. Voilà pourquoi ces dizaines de milliards de dollars ne comprennent pas uniquement le financement de la construction de sept nouveaux stades, mais aussi celle d’autoroutes, de voies ferrées, de ports, d’aéroports, ou encore d’hôpitaux et de lignes de métro. 

Ces investissements globaux de 187 milliards d’euros font de l’émirat le détenteur d’un double record : le Qatar sera le plus petit État à accueillir un événement sportif majeur de l’ampleur de la Coupe du monde de football. Mais la principauté du golfe Persique sera également le pays qui aura investi le plus d’argent pour l’organisation d’un tel événement – même si ces investissements globaux dépassent largement la seule organisation du Mondial ; le coût de la construction des seuls stades s’élèverait à près de 10 milliards de dollars. À titre de comparaison, les coûts liés à l’organisation des deux dernières Coupes du monde (2014 au Brésil et 2018 en Russie) se sont chiffrés entre 12 et 15 milliards de dollars pour les pays hôtes. Du fait d’un niveau d’infrastructures existantes relativement important, les précédentes à avoir eu lieu en Europe ont coûté beaucoup moins cher : entre 2 et 4 milliards de dollars pour la France, en 1998, et pour l’Allemagne, en 2006. 

A court terme, seules les retombées de la Coupe du monde ont été évaluées. Elles seraient de l’ordre de 9 milliards de dollars, à en croire le président du comité d’organisation de la compétition, qui s’est exprimé dans un podcast diffusé le 27 septembre dernier par la chaîne qatarie panarabe Al Jazeera. Dans cette interview, relayée par le quotidien qatari Al-Raya et résumée par Courrier International, Nasser Al-Khater, CEO du Mondial, indiquait que les retombées économiques globales du Mondial pourraient atteindre 17 milliards de dollars. Ce chiffre comprend les revenus générés pendant la compétition, mais également les recettes prévues après le tournoi, provenant notamment du flux touristique à venir, les années suivantes. « Tous les pays, comme le Brésil, en 2014, et la Russie, en 2018, qui ont accueilli le tournoi, ont connu une augmentation de l’activité touristique », explique le patron de la compétition.

Le Qatar développe depuis les années 1980 une forte croissance économique. Il affiche l’un des PIB par habitant les plus élevés au monde. Mais, contrairement à ce que l’on pourrait croire, étant donné l’opulence de l’émirat, ces rentrées de devises intéressent tout de même le pays, car elles marquent le début d’une conversion que doivent accomplir tous les pays du Golfe – et plus largement les pays producteurs de gaz et de pétrole dont les sources ont commencé à se tarir. Alors que d’autres nations veulent réussir leur « transition écologique », le Qatar, lui, doit réussir sa « transition de richesses » et diversifier son économie. D’autant que les crises sanitaires et économiques, la guerre en Ukraine l’ont bouleversée comme celle de ses voisins. L’an dernier, le Qatar a connu son premier déficit budgétaire depuis quinze ans, estimé à plus de 12 milliards de dollars. Les fluctuations du cours du baril questionnent les équilibres budgétaires des pays producteurs. Le ministre des Finances Ali Shareef Al-Emadi a ainsi estimé que « l’argent destiné aux projets pour la Coupe du monde [n’était] pas menacé par des coupes budgétaires. Et ce, malgré les fluctuations des prix du pétrole ». 

Si le Qatar a tant investi dans le sport, c’est, certes, d’abord pour des raisons de « soft power » : à l’époque, l’émirat espérait se détacher de la tutelle de son grand voisin, l’Arabie saoudite, qui domine le monde arabe sunnite. C’est aussi pour parce que c’est un secteur porteur d’une image de dynamisme de d’innovation. Pour les autorités de Doha, celle-ci doit permettre au Qatar d’orienter son économie pour en faire un pôle d’attraction touristique, digital et des industries du numérique. 

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