Ex-chef du gouvernement et ancien ministre, successivement aux affaires européennes, au budget et à l’intérieur, Bernard Cazeneuve dresse un bilan sévère de huit ans de macronisme, lequel, à ses yeux, « préfigurait le grand retour des pires travers de la IVe République » et laissera une société française « plus fracturée en 2027 qu’elle ne l’était en 2017 ». L’ancien député, qui a quitté le ps en 2022 et lancé son mouvement, la Convention, livre un diagnostic clinique sur l’état de notre pays et « la balkanisation du paysage politique ». Il préconise, pour endiguer la vague populiste qui monte en France comme dans le monde, « une vision forte de la nation ». Et exhorte les européens à « désormais assurer par eux-mêmes la défense de leurs intérêts et de leur continent ».

Photo : Samuel Kirszenbaum
Quel regard portez-vous sur la situation politique actuelle ? Bernard Cazeneuve La dissolution a accéléré un processus d’avachissement politique et institutionnel auquel de nombreux acteurs ont depuis longtemps prêté la main. L’effacement organisé, à partir de 2017, du clivage droite-gauche, l’affaissement des partis de gouvernement et la « narcissisation » des comportements, catalysée par les réseaux sociaux agissant comme la caisse de résonance de meutes numériques haineuses et désinhibées, ont contribué à la confusion et à la désarticulation du paysage politique. En quoi la dissolution de juin 2024 a-t-elle aggravé cet état de fait ? B.C. La dissolution a révélé les fissures d’un édifice depuis longtemps ébranlé. La fonction présidentielle est désormais atteinte. Le gouvernement est percuté par une instabilité devenue chronique, qui transforme les4555