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Les Rencontres de L'Hémicycle

La directrice de l’immobilier du groupe SNCF propose d’intégrer l’environnement et le social dans la valorisation foncière

C’est la proposition qu’a faite Katayoune Panahi lors des dernières Rencontres de L’Hémicycle.

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Logement et urbanisme, c’était le thème des Rencontres de L’Hémicycle de cette rentrée 2023, le 7 septembre. Elles auraient pu s’intituler « crise de l’immobilier » tant la situation du secteur est dégradée en France, comme l’a rappelé, le jour même dans Le Monde, Véronique Bédague, la patronne du groupe immobilier Nexity. L’affaire est structurelle disent certains experts, avec des facteurs qui s’additionnent : la hausse des taux d’intérêt, les nouvelles normes écologiques, le prix du foncier, la suppression de la taxe d’habitation qui empêchent, sans doute, les maires de construire… Depuis la remontée de taux, les prêts immobiliers sont, en effet, au plus bas depuis dix ans (45%), la production de logements neufs aussi, les investissements sont de plus en plus lourds pour remettre aux normes les passoires énergétiques – qui vont être retirés de la location… Tout ceci crée les conditions pour anesthésier l’offre locative à une période où la demande explose : plus de 2 millions de Français attendent un logement social. Pour en parler, L’Hémicycle avait réuni sur son plateau des experts, des grands acteurs du secteur et des responsables publics.

Alors que le logement représente, et de loin, la première dépense des ménages, ce sujet ne fait paradoxalement pas partie des priorités des Français. « Quand on les interroge, 80% des Français sont satisfaits de leur logement, de sa qualité, de son espace,souligne Laure Salvaing, directrice générale de Kantar Public France. En revanche, quand on leur demande si la situation se dégrade ou s’améliore, ils sont 80% à penser qu’elle se dégrade, et ils sont inquiets pour l’avenir du logement en France. » Laure Salvaing relève trois points de crispation : le coût (les loyers, l’achat, les taux d’intérêts), la disponibilité, c’est-à-dire l’offre de logement (les citoyens considèrent qu’il n’y a pas assez de construction ou de rénovation, et qu’il y a beaucoup à faire en termes de simplification administrative : « 82% disent que c’est le parcours du combattant pour accéder au logement »), et enfin la qualité, avec cette question : comment faire pour mettre aux normes son logement dans le cadre des nouvelles dispositions environnementales et climatiques. 

Photo : Thierry Mandon et Laure Salvaing

« Je pense que c’est d’abord une crise de l’incertitude, de toute nature et pour tout le monde, abonde Thierry Mandon, ancien secrétaire d’État à la Réforme de l’État et à la Simplification, aujourd’hui secrétaire général du nouveau Conseil national du commerce. Il y a de l’incertitude sur la croissance, qui vient ou ne vient pas. Or, l’investissement lourd que les ménages font une fois ou deux dans leur vie, c’est le logement. Incertitude sur les modes de vie : est-ce que je projette ma vie dans l’urbain ou ailleurs, grâce au télétravail. Incertitude, enfin, sur mes actifs, sur ma capacité à les céder pour acheter… ». Pour Thierry Mandon, ces incertitudes produisent deux choses : de la tétanie pour les investisseurs, pour ceux qui souhaitent vendre et qui attendent des jours meilleurs, et ceux qui veulent acheter ; cela produit aussi du principe de précaution : avant de prêter, les banquiers font attention. « Si vous voulez que la machine redémarre, il faut absolument produire du sens et de la lisibilité de long terme pour trouver des réponses à une situation compliquée », conclut-il. 

Maire de Montrouge, une commune de 50 000 habitants aux portes de Paris, Etienne Lengereau partage cette appréciation : « Il y a de l’incertitude chez les gens sur le fait de savoir comment ils vont vivre et travailler ; le covid est passé par là ». Sa commune est l’une les plus denses de France. « Or, on ne peut plus continuer à étaler la ville en raison du réchauffement climatique, explique-t-il. L’idée d’une densité acceptable est au cœur des débats. Peut-être que cette crise va avoir du bon ? Je pense à l’immobilier de bureau qui s’effondre, peut-être qu’on n’en a plus besoin avec le télétravail ? Des tours entières vont se vider, et des promoteurs réfléchissent à construire des logements. »

La construction de logements est un enjeu clé. Ancien maire de Sarcelles et député du Val-d’Oise, ancien président de l’agence nationale de rénovation urbaine (Anru), François Pupponi explique pourquoi on en manque. « On n’a jamais aussi peu construit,dit-il. On toujours espérer atteindre 500 000 logements par an, on est à peine à 100 000. Pourtant, les permis sont là, mais les promoteurs et les bailleurs ne les sortent pas parce que les banques leur disent qu’ils ne les financeront qu’à partir de 50% de réservation. Sans crédit, les promoteurs et bailleurs ne peuvent pas préfinancer les projets. Et puis, il y a le politique qui pense que le logement, c’est terminé. Un gouvernement qui voit une crise comme celle-là et qui ne prend aucune mesure pour que ça s’arrange, c’est qu’il se dit que le système va d’autoréguler. »

Katayoune Panahi, elle, dirige la branche immobilière du groupe SNCF, qui est le deuxième propriétaire foncier après l’État, avec un patrimoine de 30 000 hectares de foncier et 8 millions de mètres carrés de bâtiments. Pour cette experte, nous vivons une période de transition inédite et il faut mettre en place de nouvelles règles pour repenser ce qu’elle appelle la fabrique urbaine. « Nous pensons que la SNCF peut être une partie de la solution, parce le foncier devient une ressource assez rare, notamment dans les centres-villes urbains. Or, nous en avons, qui a le mérite d’être souvent bien situé, à proximité des gares, d’être très largement artificialisé, d’avoir eu de multiples vies et, donc, de contribuer à l’objectif de ‘‘zéro artificialisation nette’’ posé par la loi Climat et résilience. »

Photo : Katayoune Panahi, François Pupponi et Etienne Lengereau (à d.).

Ce patrimoine présente de nombreux atouts, mais sa valorisation se heurte au principe d’une époque, celle de la reconstruction d’après-guerre, qui veut que plus un terrain est constructible, plus il vaut cher. « Or, à chaque fois qu’on travaille sur la valorisation du foncier, on nous demande de répondre à un double aspiration, souligne Katayoune Panahi : d’une part, d’aller dans le sens des objectifs écologiques et, donc, de prévoir une grande part de renaturation dans nos opérations, en clair de végétaliser, d’autre part, de prévoir des logements à prix abordables dans les centres-villes, donc des logements sociaux, Or chacun sait que les espaces verts et les logements sociaux, ce n’est pas ce qui permet de rentabiliser économiquement les opérations, parce que celle-ci repose sur un principe révolu. Nous prônons de changer de modèle de valorisation foncière et de faire en sorte qu’elle ne repose pas uniquement sur sa constructibilité mais que la valeur du foncier intègre désormais aussi la création de valeur environnementale et sociale. »

L’intégralité de l’émission de l’émission est à revoir sur notre chaîne YouTube

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