C’est à la fin du XIXe siècle, dans une France qui est déjà un grand pays d’immigration, que naît la rhétorique politique ciblant les étrangers. Elle refleurit, depuis lors; inexorablement, immuable, à chaque période de crise.

Illustration : Emmanuel Polanco
Printemps 1848, région de Lille. Alors que l’idéal de fraternité de 1789 vient d’être ravivé par le renversement de la monarchie de Juillet au profit de la IIe République, des ouvriers français travaillant dans les filatures du Nord s’en prennent violemment à leurs nombreux collègues venus de Belgique. Accusés d’être vendus aux patrons et d’accepter des salaires trop bas, beaucoup de ces travailleurs étrangers sont passés à tabac. Certains sont même enlevés et reconduits manu militari à la frontière. En France, l’invention du discours anti-immigration, dont la violence xénophobe constitue la forme extrême, ne date pas du XXe siècle finissant et de l’époque où, une fois évanouie la croissance des Trente Glorieuses, le FN en a fait sa martingale électorale. Apparaissant dès l’affirmation du phénomène4555