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Économie

Thierry Derez : « La sécheresse a un coût très important pour la société »

Le directeur général de Covéa est l’invité des « Décideurs engagés de l’assurance », une émission de l’Institut de formation de la profession de l’assurance (Ifpass), en partenariat avec L’Hémicycle. Il appelle, dans un livre blanc, à mettre tous les acteurs publics autour de la table, car les assureurs ne pourront pas couvrir tous les risques climatiques.

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Pourquoi avoir rédigé un livre blanc sur les risques climatiques et à qui s’adresse-t-il ?  

Thierry Derez Le danger climatique est une notion polymorphe, et l’accentuation du risque n’est pas la même lorsque l’on parle de sécheresse, d’inondations ou de tempêtes. Ce livre blanc tente d’y voir un peu plus clair sur chacun de ces phénomènes, avec des chiffres et des exemples concrets pour mieux cerner la situation. Nous avons la chance d’avoir le plus important portefeuille d’assurances en France dans les domaines de l’automobile (10,5 millions d’assurés) et de l’habitation (8,5 millions d’assurés). Ce socle nous confère une connaissance un peu plus fine et exhaustive que d’autres acteurs.  

Ce livre est aussi un appel aux bonnes volontés, une sorte de bouteille à la mer. Car les assureurs, seuls, ne pourront pas traiter le sujet. Nous cherchons à engager un dialogue avec toutes les parties concernées, et en premier lieu, avec les plus éminentes : les pouvoirs publics. Or, l’État seul ne peut pas tout régler, non plus ; il faut que les régions, les départements et les communes entrent dans cette boucle pour chercher, avec nous, des solutions. La deuxième catégorie d’acteurs que nous souhaitons inviter à cette table est constituée des professionnels du risque, des assureurs, des réassureurs, qui, évidemment, ont leur mot à dire et un diagnostic à offrir. Enfin, il y a la population dans son ensemble, puisque les solutions ne seront viables que si elles sont acceptées. Des propositions qui ne feraient pas l’objet d’une pédagogie suffisante risquent d’être compromises par une incompréhension.  

Parmi les risques que vous avez identifiés, quelle urgence faut-il traiter en priorité ? 

T. D. Si l’on choisit la question du coût comme critère pour classer les phénomènes, il faut incontestablement commencer par la sécheresse. Malheureusement, elle s’annonce récurrente. On estime aujourd’hui que près de dix millions d’habitations – principalement des maisons individuelles – sont exposées à ce risque. Pour rappel, le coût moyen d’un sinistre dû à la sécheresse se situe autour de 100 000 euros. Je vous laisse faire le calcul… Le coût est extrêmement important pour l’ensemble de la société. Nous pensons que la sécheresse, du fait de la charge qu’elle va représenter dans les prochaines années, mérite d’être le point d’entrée de notre discussion. Les dégâts climatiques ont coûté 10 milliards d’euros aux assurances en France, avec près de 3 milliards uniquement pour la sécheresse. 

Les inondations représentent le deuxième enjeu et les tempêtes, le troisième. Le coût annuel moyen des dommages causés par les inondations s’élève à 500 millions d’euros. Quant à la grêle, elle est imprévisible, le montant des dégâts est relativement irrégulier d’une année sur l’autre. L’année 2022 a été particulièrement chargée avec plus d’un million de sinistres pour un montant de 5,1 milliards d’euros, contre 850 millions d’euros en 2014. Ce phénomène reste ponctuel et ne frappe pas une zone aussi importante que la sécheresse. 

Avez-vous déjà entamé des discussions avec l’État à ce sujet ? 

T. D. L’outil essentiel, c’est la Caisse centrale de réassurance. Cette dernière a déjà considérablement puisé dans ses réserves en 2022, en raison de la sécheresse et de la grêle. Ce régime est à court de capacités. Aujourd’hui, près de 12% des cotisations automobile et habitation que chacun paye alimentent cette caisse centrale. Ce taux sera-t-il suffisant dans les prochaines années ? Quel serait le taux souhaitable ? Nous estimons qu’il faudrait s’acheminer progressivement vers les 18%. Sur ce sujet, le ministère des Finances est évidemment notre interlocuteur principal, mais les autres ministères devraient être aussi mis dans la boucle. Je pense d’abord à celui de l’Agriculture, car on ne peut traiter les questions de sécheresse sans avoir le retour des agriculteurs, qui sont au premier rang face à ce risque climatique.  

Certaines régions seront-elles plus soumises que d’autres à ces risques ? 

T. D. Les Pyrénées sont un exemple assez parlant des phénomènes que nous rencontrons en ce moment : si vous vivez à l’est, vous êtes confronté aux sécheresses, et si vous êtes à l’ouest, aux inondations… Ce n’est pas la sécheresse, puis les inondations : les deux phénomènes se produiront en même temps sur le territoire, en fonction des zones. Certaines régions seront confrontées aux deux risques dans un laps de temps très court, avec une catastrophe qui s’enchaîne après l’autre. 

Quelles solutions peut-on déjà mettre en œuvre pour prévenir les dégâts ? 

T. D. Nous menons une expérimentation sur plusieurs dizaines de maisons qui sont en zone de sécheresse certaine, avec un mécanisme d’hydratation des sols qui stocke l’eau des pluies avant de la distribuer. Nous utilisons des technologies d’intelligence artificielle pour mieux déterminer cette distribution. À partir de la nature des sols, les machines pourront nous recommander les niveaux d’hydratation selon la typologie de la terre. Tant que l’on n’a pas vu les sols gonfler, puis se rétracter, on ne peut connaître les conséquences sur une maison. Avant que cette expérience puisse être validée comme un moyen judicieux et efficace de prévention, des années vont toutefois s’écouler. Il nous faut donc un peu de temps, et on sait à quel point il est précieux. 

Invité des « Décideurs engagés de l’assurance », une émission de l’Institut de formation de la profession de l’assurance (Ifpass), en partenariat avec L’Hémicycle, le directeur général de Covéa appelle, dans un livre blanc, à mettre tous les acteurs publics autour de la table, car les assureurs ne pourront pas couvrir tous les risques climatiques.Invité des « Décideurs engagés de l’assurance », une émission de l’Institut de formation de la profession de l’assurance (Ifpass), en partenariat avec L’Hémicycle, le directeur général de Covéa appelle, dans un livre blanc, à mettre tous les acteurs publics autour de la table, car les assureurs ne pourront pas couvrir tous les risques climatiques.

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